"On a perdu nos Espagnols" : Carcassonne se languit de ses touristes étrangers
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"On a perdu nos Espagnols, c'est dramatique", se lamente Stéphane Rives, propriétaire de trois hôtels au pied de la cité médiévale de Carcassonne, un site classé au Patrimoine mondial de
l'Unesco très prisé des touristes étrangers avant la pandémie de coronavirus. Sous une chaleur caniculaire, Carles Blanch, un des rares Catalans rencontrés sur place, n'est pas surpris:
"Comme il y a un rebond (de l'épidémie) en Espagne, beaucoup ont peur de se déplacer. Ils préfèrent rester près de leur province".
Lui et sa famille "essaient de ne toucher à rien" et "de rester décontractés". "Nous, on est bien protégé. Cette année, on a décidé d'avancer nos vacances parce que le confinement nous a
fatigués", indique le quadragénaire, caché derrière sa casquette et son masque FFP2.
Cet été, les milliers de touristes masqués qui arpentent chaque jour les petites ruelles de la ville fortifiée sont principalement Français. Une première pour le joyau de Carcassonne qui
enregistre une baisse record de la fréquentation des visiteurs, notamment étrangers.
Cet ensemble médiéval unique en Europe, qui doit son succès à son état exceptionnel de conservation et aux travaux de restauration entrepris au 19ème siècle par Viollet-le-Duc, attire entre
deux et trois millions de visiteurs chaque année, dont la moitié viennent traditionnellement d'Espagne et notamment de la Catalogne voisine.
"Par rapport au mois de juillet 2019, on a perdu 48% de notre visitorat. Les Français représentent 75% de la clientèle alors que normalement, ils ne représentent que 40%", explique à l'AFP
Christophe Varennes, administrateur du monument. "Il y a seulement 8% de Belges, 4,5% de Néerlandais et 3% d'Espagnols alors qu'ils sont premiers normalement".
Site le plus visité de la région Occitanie devant le Pont du Gard, la Cité de Carcassonne est très dépendante des touristes étrangers qui, cette année, reportent leur déplacement en raison
de la crise sanitaire. Au grand dam des hôteliers et restaurateurs.
Sur ses trois hôtels, Stéphane Rives enregistre une "perte estivale monstrueuse" de 30%. "Encore, faire -30% en hiver, c'est rattrapable. Là, sur les deux plus gros mois de l'année, c'est
dramatique", lâche-t-il.
"Cette année, si ça continue comme ça, on aura une perte fiscale de 800.000 euros. C'est comme si j'avais passé cinq ans de ma vie à travailler pour rien", poursuit-il, précisant ne pas
savoir comment rembourser les "emprunts considérables". Même constat pour le chef Pierre Mesa, qui fête sa 20ème année à la tête d'un des plus vieux établissements de la Cité. "On n'a plus
cette masse étrangère que les Français ne vont pas remplacer. On vit presque au jour le jour", explique-t-il.
"On est déjà content d'avoir un travail. On aurait pas cru ça lors de la réouverture (le 5 juin, après la période de confinement). Maintenant, l'objectif ce n'est pas de gagner de l'argent
mais d'engranger de la trésorerie pour affronter l'après-rentrée et sauver mon entreprise", poursuit M. Mesa.
"On ne sait pas si on aura une clientèle étrangère. On a une visibilité sur 15 jours. Pour nous c'est vital, on a besoin de trésorerie sinon ce sera la cessation de paiement", renchérit
Hadrien Pujol, directeur d'un hôtel cinq étoiles situé au pied de la basilique Saint-Nazaire, plus vieille église de la Cité. Comme beaucoup d'autres, M. Pujol "s'endette pour exister".
À partir du mois de septembre et sans les visiteurs étrangers, l'activité dans la Cité reposera sur une nouvelle clientèle: les retraités. "Mais est-ce qu'ils voudront venir?", s'interroge
l'adjointe à la mairie en charge du Tourisme et de la Cité, Magalie Bardou. Avant d'ajouter: "J'espère que les commerçants pourront tenir".