De la chine à la bolivie, les forçats du charbon triment toujours
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En France, où l’extraction du charbon s’est arrêtée en avril 2004 avec la dernière descente à la Houve en Lorraine, le charbon fait encore et toujours parler de lui, comme ailleurs dans le
monde. N’a-t-on pas découvert, il y a quelques années, entre les villages de Cossaye et de Lucenay-les-Aix (Nièvre), dans le prolongement de l’ancien bassin de La Machine, le plus grand
gisement d’Europe ? En 2009, le gouvernement et son ministre de l’Environnement Jean-Louis Borloo ont dit non au projet d’exploitation de ces 250 000 millions de tonnes de houille. En 2014
la proposition faite, par une société australienne, pour transformer ce charbon en gaz, n’a pas été retenue non plus. Il n’en reste pas moins que nombre de locaux craignent l’éventuelle mise
en route d’un gigantesque chantier dans la région. QUAND LE SOL SE DÉROBE Conscients des ravages qu’une exploitation minière peut causer sur le cadre naturel et le bâti, ils redoutent sans
doute de voir, comme dans le Pas-de-Calais, à Auboué et à Moyeuvre Grande en Lorraine ou à Noyant d’Allier, leurs maisons se fissurer, voire s’affaisser sous l’effet des vides laissés par
l’extraction de l’or noir dans lesquels l’eau s’est infiltrée. Aujourd’hui, en Chine, des villes entières sont menacées. Après trente ans d’exploitation dans la province septentrionale du
Shanxi, 655 000 habitants doivent être relogés avant la fin de l’année 2017, leurs habitations s’enfonçant inexorablement dans le sol. Dans de nombreuses mines de l’empire du Milieu et dans
certains pays d’Amérique latine comme la Bolivie, l’exploitation des richesses souterraines se poursuit à grande échelle dans des conditions sans doute comparables à celles décrites par
Émile Zola, en 1885, dans _Germinal_. Les hommes qui y travaillent ne sont pas seulement confrontés à l’effondrement de leurs habitations, si modestes soient-elles. Leurs conditions de vie
et de travail sont le plus souvent désastreuses. Dans _La Ville noire_ (1860), roman prémonitoire, George Sand avait choisi de planter son décor dans une cité minière du centre de la France
où la poussière de charbon s’infiltre dans les moindres recoins, recouvre les maisons, les arbres, les rues, noircit les cours d’eau. Jusqu’à une date relativement récente, rares ont été les
observateurs, les acteurs et même les historiens de la mine à s’intéresser aux dégâts causés, à l’environnement, par l’exploitation de minerais. CONFLITS MEURTRIERS Depuis la mi-août plus
de 1 500 mineurs de la China Coal Pingshuo Co. Ltd, une entreprise d’État, sont en grève pour protester contre les déductions non justifiées constatées sur leurs feuilles de paye, obtenir
une protection sociale digne de ce nom, mais également réclamer la libération de leurs camarades détenus après les graves heurts qui se sont produits avec la police. Au même moment, le
président bolivien a accusé les mineurs de tentative de coup d’État après le décès du vice-ministre de l’Intérieur Rodolfo Illanes, roué de coups en tentant une médiation auprès des «
gueules noires » en grève. Là, comme en Chine, la violence est extrême dans les bassins. L’arme des mineurs en colère est la dynamite qu’ils utilisent, au fond, pour le foudroyage. Les 100
000 ouvriers des coopératives minières boliviennes, qui n’ont de coopératif que le nom, travaillent dans des veines de très mauvaise qualité. Ils sont exploités et n’ont pas le droit de se
syndiquer. SITUATION EXTRÊME EN MONGOLIE Dans les mines – souvent illégales – de Mongolie intérieure, celles qui approvisionnent Pékin en charbon, la violence ouvrière atteint des sommets.
Dix-sept mineurs, sur un total de soixante-quatorze suspects, ont été reconnus coupables d’avoir assassiné certains de leurs camarades, puis d’avoir maquillé leur forfait en accident du
travail. C’est en se faisant passer pour des parents des victimes qu’ils ont obtenu le versement d’indemnités. Lorsque des mineurs déclarés morts ont été repérés vivants, le petit gang
d’anciens paysans originaires de Zhaotong (Yunnan) a été démasqué. Ils sont soupçonnés d’avoir tués en série, d’avoir carbonisé les corps avant d’en disperser les cendres, reproduisant ainsi
un fait divers des années 1990, qui a lui-même a inspiré Li Yang pour son un film _Blind Shaft_ (2003). LA CHASSE AUX MINES ILLÉGALES En Chine, Greenpeace a récemment découvert trois mines
illégales – d’antimoine, de tungstène et de molybdène – à Shangri-La (Yunnan), sur le site des trois fleuves parallèles (Yangtzé, Mékong et Nü) classé au Patrimoine mondial par l’Unesco.
Responsables de la déforestation de la zone, menaçant de provoquer des glissements de terrain, elles rejettent leurs déchets dans la nature. Depuis peu, les autorités chinoises s’efforcent
d’améliorer la situation dans les mines et de veiller à un meilleur respect de l’environnement. Le gouvernement vient, ainsi, de décider la fermeture de quinze mines dans le Shanxi. Il
compte, dans les prochains mois, mettre un terme à mille exploitations supplémentaires. Si bien des mineurs, privés de travail, regrettent la fermeture des puits, les mines n’en demeurent
pas moins, aujourd’hui encore, l’une des industries les plus polluantes et les plus meurtrières au monde.