Le service rugby de canal+ secoué par une affaire de sexisme
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APRÈS LE LICENCIEMENT D'UN JOURNALISTE RUGBY DE CANAL+ POUR COMPORTEMENTS ET PROPOS SEXISTES JUGÉS INAPPROPRIÉS EN DÉCEMBRE DERNIER, UNE ENQUÊTE INTERNE A ÉTÉ LANCÉE AU SEIN DE LA
RÉDACTION. A SON TERME, CINQ MISES À PIED ONT ÉTÉ PRONONCÉES CETTE SEMAINE. _« Je suis très en colère. »_ Le 2 juin dernier, Maxime Saada a convoqué le service rugby de Canal+, et tous les
smartphones ont été préalablement déposés dans un bac pour éviter tout enregistrement. Le patron de la chaîne cryptée a présenté les résultats d'une enquête interne lancée après le
licenciement en décembre dernier d'un reporter-commentateur de la rubrique pour des comportements et propos sexistes jugés inappropriés envers deux de ses collègues. Les deux jeunes
femmes s'en étaient plaintes et avaient pu montrer de nombreux messages obscènes reçus sur leur téléphone. L'une d'entre elles aurait également indiqué s'être vue
proposer avec insistance de la drogue. Elles ont communiqué des captures d'écran des messages qu'elles ont reçus que nous n'avons pas souhaité reproduire ici, mais dont la
teneur - _« J'ai envie de te démonter_ » par exemple - paraît sans équivoque. L'une des jeunes femmes qui a, depuis, changé de service, est actuellement en arrêt maladie. Le
reporter à l'époque s'était défendu auprès de quelques collègues en évoquant des échanges consentis et des messages tronqués. Son licenciement faisait suite à l'éviction, à
l'automne 2024, d'un journaliste en CDD récurrent sur Infosport+, la chaîne d'info sportive du groupe Canal+, cette fois pour « harcèlement d'ambiance » (blagues
sexuelles). Les deux hommes, qui n'ont pas souhaité nous répondre tout comme les salariées qui ont dénoncé les faits, contestent les sanctions. Le premier a engagé une procédure aux
prud'hommes et le second serait sur le point de le faire. UN FONCTIONNEMENT « MASCULINISTE » DÉNONCÉ DANS CERTAINS TÉMOIGNAGES La chaîne, après ces évènements, a donc décidé de lancer
une enquête interne sur d'éventuels comportements sexistes et de harcèlement au sein de la rubrique rugby. Selon nos informations, sur les 34 témoignages recueillis, avec un anonymat
préservé, trois quarts feraient état d'une ambiance de travail irréprochable, professionnelle, et un quart signalerait un fonctionnement « masculiniste » et des comportements sexistes.
Deux visions s'opposent et elles ont pesé fortement cette saison sur le service dirigé par Eric Bayle. _« Avant l'hiver, au moment du licenciement, on a eu peu d'informations
et d'explications sur ce qui s'était vraiment passé, et on ne savait pas ce qui nous attendait avec l'enquête »_, raconte un membre du service. L'un des consultants de la
chaîne, Mathieu Blin, l'ancien talonneur du Stade Français, dans les émissions et pas au quotidien dans la rédaction, reconnaissait, il y a quelques semaines, avant le rendu de
l'enquête, avoir eu écho _« d'une ambiance compliquée. Même si les sujets sont totalement différents, j'avais déjà connu cela lors du licenciement de Sébastien Thoen_ (en
novembre 2020 pour une parodie de l'émission de Pascal Praud sur CNews) _et de la pétition de soutien signée par une partie des gens de Canal (148 signataires dont 48 anonymes). Cela
crée forcément de la méfiance, de la défiance ou de l'anxiété dans les discussions. Avec souvent deux groupes qui s'opposent. »_ DES PREUVES ACCABLANTES SELON MAXIME SAADA +Libres,
le syndicat majoritaire de Canal+, explique que l'un de ses élus _« a participé à l'enquête en tant que représentant du personnel, en étroite collaboration avec un représentant de
la direction des ressources humaines »_ et ajoute que _« le dossier est désormais entre les mains de la direction, qui devra, le cas échéant, prendre et appliquer les sanctions nécessaires.
»_ Devant la rédaction rugby, le 2 juin, Maxime Saada aurait précisé avoir lui-même pris connaissance des messages adressés aux deux salariées qui ont dénoncé les faits concernant le
reporter licencié et que les preuves étaient accablantes. Il aurait rappelé sa ligne de tolérance zéro sur ces sujets, tout comme le directeur des sports Thomas Sénécal, et qu'il y
aurait des conséquences. Elles n'ont pas tardé : trois journalistes du service, en CDD jusqu'au 30 juin, ainsi que deux CDI, ont fait l'objet cette semaine d'une mise à
pied conservatoire. D'autres faits sont ressortis de l'enquête, notamment des propos inappropriés - au total, quatre femmes se sont plaintes auprès de la direction-, propos qui ont
été diffusés sous forme de verbatims lors de la restitution de l'enquête au service rugby. Un journaliste, pour évoquer un supposé manque d'aisance d'une consultante rugby à
l'antenne, aurait ainsi déclaré : _« Elle devrait se faire violer par un mec qui sort des Baumettes, ça lui ferait du bien »_. Mathieu Blin, qui connaissait le reporter licencié en
décembre, et lui avait d'ailleurs adressé quelques messages au moment de l'affaire, dont il ne connaissait pas les détails, est très engagé sur le sujet des violences sexistes et
sexuelles, notamment au sein de la Fondation pour le sport inclusif dont il est co-président. Il réclame une vigilance de tous les instants sur ce sujet : _« J'ai la chance d'avoir
été élevé par des personnes très engagées, notamment dans des mouvements féministes. » Néanmoins, par le passé, il m'est déjà arrivé de m'interroger : « Ai-je pu être lourd à un
moment ? » Je ne le crois pas, en tout cas certainement pas par des attitudes interdites par la loi, ça j'en suis sûr. Malheureusement, certains peuvent encore les banaliser
aujourd'hui : « Oh, ça va, c'était juste une main au cul », « Oh, ça va, je lui ai juste reluqué les seins », « Oh, ça va, j'ai juste insisté cinq fois pour lui offrir un
verre ». Non, il n'y a pas de « ça va ». Draguer, ce n'est pas insister, ce n'est pas harceler. » _Contacté, le groupe Canal+ n'a pas souhaité réagir.